Après une acclimatation à Montréal et un premier contact avec Québec et ses alentours, la troisième étape de notre périple était très attendue: Saint-Joseph de la Rive, au coeur de la région de Charlevoix. C’est toute une histoire, avec une météorite qui s’est affalée ici il y a perpète et qui a créé un cratère de près de 60km2.
Pas certains d’avoir repéré le cratère (dans ma tête je dis déjà “crôteïre”, ça vient tout seul ce bel accent) mais on a découvert une particularité qui ne nous surprendra bientôt plus aux alentours du fleuve: les routes sont aussi droites que possible. Donc s’il y a une colline on la franchit en ligne droite: montée raide, descente tout aussi directe, pour la plus grande joie des enfants qui scandent “ne freine pas pour voir si on arrive à remonter” à chaque coup. Difficile d’avoir le rendu en photo, mais un avantage énorme à cette technique: pas de mal du voyage pour Noam. Et très souvent une belle surprise en haut de la côte quand la descente suivante se dévoile.

Rien à voir donc avec le fait que notre première expérience avec ce type de construction routière se soit faite dans le village répondant au nom des Éboulements, dont Saint-Joseph de la Rive dépend. Ouf, si les freins de notre bolide tiennent le choc, on ne va pas finir en éboulis dans le Saint-Laurent. Et pour la petite histoire: du temps où il n’y avait pas de pompe entre le réservoir à essence et le moteur, les véhicule devaient monter cette côte… en marche arrière. Heureusement notre voiture Schtroumpf tient le coup pour ça.

Après la déception du B&B à Québec, l’Auberge de la Rive (du Saint-Laurent, dois-je le préciser?) a quant à elle tenu ses promesses. On a une chambre de Motel en face du bâtiment principal de l’Auberge. Le Motel est donc tout relatif car il est à peu de choses près en bord de cul de sac, mais on peut initier les enfants au mythe sans risques. On va pouvoir dormir dans le calme, ouf numéro 2 de cette séquence!

A l’Auberge, il y a une énorme salle commune avec cuisine, ce qui facilite les repas. Les enfants adorent le kicker et y inventent une série de challenges à l’allure tictoc-esque (on les observe du coin de l’œil pendant qu’ils filment les levels successifs). Bref, on est dans un petit coin de paradis (bien mérité, maintenant que le décalage horaire est digéré): calme, vue majestueuse sur le fleuve, environnement adapté à notre bande.

On découvre aussi le Boulanger-Dépanneur à deux pas de l’Auberge, avant de prendre le traversier qui nous dépose sur l’Ile-aux-Coudres au milieu du Saint-Laurent. Gros coup de coeur insulaire encore une fois (après l’Ile d’Orléans à Québec), en particulier pour la pointe de l’Islet où on se voit bien un jour se poser à l’hôtel du Havre Musical exploité par deux musiciens/chef d’orchestre célèbres par ici.

La pluie nous rejoint en soirée mais peu importe, le fleuve nous plaît toujours autant et on se délecte déjà à l’idée de passer plus de temps sur l’Ile le lendemain.
Arthur anime un peu notre première nuit de Motel en allant se coucher dans la valise pendant un épisode de somnambulisme dont on a promis de taire le monologue, mais rien qui n’empêche de profiter du “bon matin” sous la bruine avant de reprendre le traversier vers l’Ile-aux-Coudres. Et vu qu’on est en mode slow, on a d’abord fait une chouette partie d’Aventuriers du rail, choisi dans la grande pile de jeux de l’Auberge.
Avec le traversier (service public gratuit), on découvre avec charme la lenteur de ce type de franchissement, ravis d’être là en semaine et de pouvoir embarquer dès que le navire se pointe. Vu la longueur de la bande prévue pour l’attente, on se dit que ça doit être moins marrant à certaines périodes. Les plus téméraires se risquent sur le pont du bateau pendant que je prends sur moi pour … euh … surveiller la voiture (je n’ai vraiment pas le pied marin, sur un malentendu je me choperais le mal de fleuve).

La promenade près de la Roche de Caya nous donne des impressions mixtes: Everglades (en mini) et marais salants ont sans doute peu en commun et pourtant, c’est l’association qu’on fait sans trop pousser les dérailleurs. Nos jumelles nous montrent hérons et mouettes, le soleil nous rejoint, le temps s’arrête.

On casse un peu la tirelire pour un lunch à La Fascine (Covid, île, taux de change, tout ça, nous diront des locaux) mais on ne regrette pas. Comme partout, le service est fort aimable et il y a une absence totale de chichi sans que ça ne fasse négligé. On se fait la réflexion qu’un resto avec la même déco serait d’office crado en France et est vraiment sympa ici. Même en déduisant un petit coup de préjugés, on reste assez surs de notre coup: la qualité de l’assiette et la modernité de la déco peuvent être dissociés sans peine. Aart ose même la spécialité locale: tartare de d’omble chevalier, ça le fait ce petit saumon déguisé!
De retour sur la terre ferme, on se jette à l’assaut du Musée Maritime de Charlevoix, sur un ancien site de construction de goélettes, ces bateaux en bois qui ont fait la fierté du fleuve que je n’ose plus nommer. Il en reste quelques belles reliques qu’on peut arpenter, bonheur ginger garanti. Le musée raconte vraiment très bien l’histoire du chantier naval, et la façon dont il a été reconverti en musée. A une petite clope près, on aurait même pu visiter 6 bateaux au lieu de 3 mais un incendie accidentel en a donc décidé autrement. Visite vraiment réussie, avec toujours le fleuve en fond de décor. Un petit tour sur la plage, sautiller sur les cailloux, respirer l’air qui est déjà marin ici (on s’approche du point où l’eau douce va devenir salée et ça se sent).

En bonus: un sentier de promenade d’un bon kilomètre-eke dans un sentir boisé, un labyrinthe, une plaine étendue, et il n’en faut pas plus. Si c’est ça l’échelle des trois sacs à dos du Routard, on valide. Quel bol d’air, encore une fois le temps semble à l’arrêt et ce fleuve nous berce d’un excès de bonté.
Je pousse une pointe jusqu’aux Éboulements pour nous acheter une lasagne qu’on dévorera après avoir converti mentalement nos Celsius en Fahrenheit (l’avantage du Québec: tout est en double langage quand ce n’est pas dans nos mesures familières).
Et on n’est pas au bout de nos surprises depuis cette belle région. Les possibilités sont multiples mais vu la météo clémente, on choisit de passer la dernière journée dans le coin à proximité des baleines. On part sous le brouillard qu’on voit se lever au fur et à mesure des descentes bien droites vers le fleuve – un régal. Une bonne heure et demi de route vers le Nord plus tard (en remontant le fleuve que vous savez) et on est à Baie Sainte-Catherine et sa Pointe Noire. Observatoire du Fjord Saguenay, nous voilà et on ne va pas être déçus. On notera qu’entre-temps on est le mercredi 10 août, juste pour constater que malgré nos impressions, le temps passe.

J’avoue qu’avant d’arriver ici, j’étais un peu gavée par tout le tamtam autour de Tadoussac et des baleines. C’est sans doute pour ça qu’on a voulu les observer une première fois depuis l’endroit qui fait face à Tadoussac, juste pour ne pas faire cliché. Et puis on relativise tout le tamtam en voyant un premier Béluga glisser sous l’eau, suivi de plusieurs autres (a défaut de téléobjectif, on a laissé la photographie aux autres et juste profité de la vue). Un petit rorqual en plus par-ci et par-là et on est devenus la famille gaga… Même pas honte en fait, c’était vraiment magique. Et tout ça depuis la terre ferme, pas besoin d’aller déranger ces jolies bestioles sur un bateau.

Après, échouer si près de Tadoussac serait dommage, donc on se refait un petit traversier (on gère le principe, la place dans la file, et on monte à bord en avant-dernière position, voilà une demi-heure de gagnée). Grâce à une ruse qui nous a été donnée au B&B de Québec (à quelque chose malheur etc.), on file tout droit vers le sentir des Dunes et on passe quelques heures au paradis, à nouveau. On grimpe (70 mètres bien raides quand même), on trempe l’orteil (ou plus, pour les autres) dans le Saint-Laurent qui est vraiment très glagla par ici (Aart pourra tout vous dire sur les courants marins), on s’extasie.

On s’extasie un peu moins quand on fait une heure de file à l’arrêt pour avoir notre place dans le traversier au retour, mais ça fait partie du jeu et là on a moyen perdu. Après, comme Aart a fait les courses pour le souper pendant que je supervisais les garçons qui faisaient karaoké avec leur playlist éclectique, on a passé un bon moment quand même (avec parmi d’autres: les Lacs du Conemara, J’aime la vie, Stromae dans toutes ses versions, Tiësto, Dua Lipa, Maneskin, …).
Et la case extase est re-cochée quand Bambi et sa mère traversent la route lors de notre passage aux Éboulements. Il ne manque plus qu’un petit spaghetti avec nos courses de chez le Dépanneur et on sent qu’on ferait la joie de l’agence inburgering locale.